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Gaza contre les colonies : une solution radicale pour sortir de l’impasse

Par Mohammed Chraibi

La guerre à Gaza dure depuis trop longtemps. Les morts se comptent par dizaines de milliers, la famine s’installe, les otages restent détenus, les prisonniers s’entassent, les colons prospèrent, et la solution à deux États s’éloigne chaque jour davantage.

Pendant que la communauté internationale multiplie les résolutions impuissantes, un projet plus discret avance, méthodiquement : l’effacement de Gaza. Jour après jour. Cette étroite bande de terre, la plus densément peuplée au monde, est dévastée, affamée,  rendue inhabitable où il ne s’agit  plus seulement d’une guerre, mais d’une stratégie de nettoyage ethnique,  méthodiquement planifiée et exécutée  par Israël et les États Unis .

Face à cela, je propose une alternative inédite structurée en phases claires. Une solution qu’aucune entité reconnue n’osera peut être porter officiellement — et pourtant, il n’en existe pas d’autre capable d’ouvrir la voie vers la création d’un état palestinien à laquelle plus personne ne croit. C’est, pour paraphraser une formule historique, la moins pire à l’exception de toutes les autres.

Gaza contre les colonies

L’idée est simple, radicale, et symétrique :

→ Israël transfère ses colons de Cisjordanie vers Gaza, qu’il annexe.

→ Les Gazaouis, en échange, s’installent dans les colonies évacuées, désormais libérées, et agrandies constituant ainsi un territoire continu entre elles et avec la Cisjordanie, rendant, ainsi,   possible la naissance d’un véritable État palestinien.

Ce plan suppose :

  1. Un cessez-le-feu immédiat, la libération des otages et des prisonniers de part et d’autre.
  2. Un accord international garantissant l’échange de la bande de Gaza contre les zones de colonisation israélienne en Cisjordanie.
  3. Une phase de deux ans pour construire en Cisjordanie des logements pour les Gazaouis en Cisjordanie (en plus des colonies qui seront libérées) et en parallèle des kibboutzim à Gaza pour les colons israéliens transférés de Cisjordanie.
  4. Une opération de transfert croisé, coordonnée, non violente, fondée sur l’accord des parties et un patronage international.
  5. La proclamation d’un État palestinien viable, continu et souverain en Cisjordanie et concomitamment la reconnaissance de Gaza comme partie intégrante d’Israël doté de la continuité territoriale que ne lui assurait aucun des autres plans de partage envisagés jusque là.

Un compromis audacieux, pas une utopie

Cette solution me semble être la moins mauvaise qu’on peut imaginer. Elle suppose des sacrifices réels :

– Pour les colons et les gazaouis, un déracinement  ;

– Pour les Palestiniens, une perte territoriale (Gaza) ;

– Pour les deux peuples, une coupure radicale dans l’histoire de leur relation et une sécurité accrue pour les deux, au moyen du réaménagement du mur de séparation entre la Cisjordanie (devenue état palestinien) et Israël, déjà existant (en partie).

Mais ces sacrifices sont symétriques et productifs. Chaque camp y gagne :

Israël : des frontières sûres , la fin du piège colonial en Cisjordanie, et un gain territorial réel.

La Palestine : un État souverain, continu, reconnu, sur un territoire aménagé, des terres fertiles, à l’intérieur de frontières protégées et la possibilité d une fédération avec la Jordanie si les deux pays le souhaitent.

Alternative : la guerre jusqu’au dernier enfant

Si rien n’est fait, le pire est assuré :

Gaza sera lentement détruite, vidé de ses habitants, annexée de facto.

La colonisation de la Cisjordanie se poursuivra et finira par être annexée avec l’aide des États Unis.

Israël ne gagnera pas la paix, mais s’enfoncera dans un apartheid militarisé.

La Palestine ne naîtra pas ( à court ou moyen terme du moins)

C’est pourquoi il faut oser une solution qui bouscule les idées préconçues , plutôt que de continuer à voir les gazaouis disparaitre sous les bombes et par la famine.

Une solution imposée ? Oui. Pour éviter l’irréversible.

Cette solution ne peut venir des seuls protagonistes. Elle devra être négociée, financée, imposée si nécessaire, par les puissances garantes : États-Unis, Europe, Égypte, Jordanie, ONU.

La paix ne viendra pas seule. Il faut la penser. Il faut la porter. Il faut l’imposer.

Il faut oser.

https://www.mohammedchraibi.com/

Mohammed Chraibi, ingénieur du Genie Rural et des Eaux et Forêts. Après quelques années passées au Ministère de l’agriculture et à l’Office Cherifien des Phosphates, il a été consultant pour diverses agences de coopération technique relevant de l’ONU.

3 thoughts on “Gaza contre les colonies : une solution radicale pour sortir de l’impasse

  1. La solution à deux états, quels qu’en soient les contours, est devenue impossible depuis belle lurette. Elle ne sert plus que d’alibi pour des diplomaties impuissantes à trouver une solution.

    La solution s’il devait y en avoir une est un état unique, démocratique et laïque où tous les citoyens seraient égaux.

  2. Reponse a Marc de B.
    Bonjour Marc
    Merci d’avoir pris le temps de lire ma tribune et de me faire part de tes remarques auxquelles je m’empresse de répondre.
    Je commence, d’abord, par préciser l’objectif prioritaire de mon papier : arrêter le génocide en cours a Gaza. Mon espoir est qu’une voix autorisée se lève pour dire : « la solution des 2 Etats est encore possible mais pas sous la forme envisagée au départ (retour aux frontières de 67), totalement discréditée par la prolifération des colonies en Cisjordanie. Un réaménagement de cette solution par le transfert de ces colonies ailleurs, permettrait de la ressusciter.. ». Israël et les US, pousseraient des cris d’effroi mais n’empêcheraient pas le débat (sur le réaménagement de la solution des 2 États 1.0) de s’engager. Ce que je dis là n’est pas insensé car je ne doute pas que les états, comme la France, qui s’apprêtent à reconnaitre la Palestine pensent à une autre solution que la solution 1.0. Mais laquelle ? Je constate qu’aucun de ces états n’a parlé d’un état palestinien ‘’ dans les frontières de 67’’. Mon idée pourrait alors être évoquée (à condition d’être connue, d’où ma tentative de la publier).
    En face, cette annonce pourrait avoir des effets bénéfiques, notamment sur le Hamas qui vient d’annoncer qu’il accepterait d’être désarmé si un état palestinien était créé et sur l’Arabie S. qui met le démarrage d’un processus crédible de création d’un état palestinien comme préalable à la reconnaissance d’Israël.
    Reste a savoir comment réagiraient les deux principaux protagonistes : Israël et Hamas. Israël ferait semblant d’être scandalisé mais n’aurait pas d’arguments, pour la simple raison que Gaza (ex Philistie) n’a jamais réellement fait partie d’Israël (l’histoire et l’archéologie l’ont montré et même la Bible prétend que Juda l’aurait conquise – Juges 1 :18 – et l’oublie ensuite). Ni les partis religieux (aujourd’hui puissants en Israël) ni les évangéliques américains (principaux soutiens d’Israël) ne pourront soutenir le contraire. Du reste le retrait de Gaza en 2005 n’avait mis en colère que les colons chassés.
    Le Hamas, affaibli, poussera aussi des grands cris mais sera obligé de céder à la pression de ses bailleurs de fonds.
    Mon sentiment est que cette solution rencontrera moins d’opposition qu’on ne pense de prime abord.
    J’en viens a la réponse à tes questions :
    1/ Oui bien entendu Jérusalem Est capitale de l’Etat Palestinien. Je ne pense pas que les Palestiniens y renonceront. Mais il faudra remettre cette épineuse question parmi celles à négocier ultérieurement. Il faut d’abord obtenir le consensus sur le principe de l’échange.
    2/ les gazaouis d’aujourd’hui sont, en grande majorité, des réfugiés de 48. Leurs racines sont ailleurs.
    3/ oui exact, l’état palestinien n’aura pas d’accès à la mer. Et alors ?, beaucoup de pays sont ds le même cas.
    4/ l’A.S. non citée ; simple oubli. Merci de me le signaler.
    5/ le Hamas menace pour Israël : je parle dans la tribune et ma réponse à un ami ( mail précédent) de la sécurité d’Israel : Garantie internationale et des pays de la région, mur de séparation (entre Israël et la Cisjordanie) infranchissable, déjà en grande partie construit. Et je ne crois pas que le futur état palestinien permettrait des tirs de roquettes à partir de son territoire. Ce serait l’inverse qui serait à craindre quand on voit ce que fait Israël au Liban et en Syrie.
    Pour le reste, ce sont des questions qui devront être discutées à un stade ultérieur. Le plus urgent est de réunir le consensus sur le principe de l’échange pour arrêter le génocide et donner sa chance à la diplomatie
    Je me répète à dessein. Si tu es du même avis, fais ce que tu peux pour diffuser l’idée. Elle finirait peut être, ainsi, par arriver à ce que j’ai appelé « une voix autorisée » qui la ferait connaitre.
    Amicalement

  3. Bonjour Abbas
    Merci d’avoir pris le temps de lire mon papier et de le commenter. Je reponds ci après à tes remarques:
    1/ Jérusalem-Est capitale de l’état palestinien est non gegociable et les colonies autour sont en Cisjordanie. Elles devront être évacuées, non demolies (comme celles de Gaza en 2005), pour accueillir près de 300 000 Gazaouis. Le fait de ceinturer Jérusalem Est ne leur confère pas un statut différent des autres colonies.
    2/Pour répondre à ton second commentaire: a/ le petrole du M.O. n’a plus pour l’Occident le caractère vital qu’il avait à partir de la fin du 19eme et jusqu’à recemment. Tu sais que les Americains veulent obliger L’UE a leur acheter 760 MM$ d’hydrocarbures dont l’UE ne veut pas. Il y a aussi la décarbonation de l’economie mondiale….b/ Israel a été voulue par l’Occident comme tête de pont pour dominer le MO et exploiter ses hydrocarbures. Rôle qu’Israel a parfaitement assumé. Aujourd hui Israel est la première puissance de la région, un pays qui defend, avant tout, ses propres intérêts. Et ceux-ci resident dans l’intégration de son économie ds l’economie régionale. L’histoire antique d’Israel, montre qu’Israel n’a été une puissance importante et prospère que lorsqu’il fut obligé, au milieu de 9ème siecle av. JC, de s’intégrer à l’economie du puissant empire assyrien, notamment, en captant le commerce caravannier arabe florissant. Aujourd hui en s’intégrant pleinement à l’economie régionale, Israel (dont la force réside dans les technologies du futur aura accès aux immenses ressources financières de l’A.S., ce que celle-ci appelle de ses voeux – voir à ce sujet dans mon site> gaza ds la presse, l’article de Haaretz sur la stratégie de MBS). Israel et ses voisins arabes ne seront pas les seuls bénéficiaires de cette integration regionale, le monde entier, y/c l’Iran dont l’économie est au bord du gouffre, en tirera profit d’une façon ou d’une autre. Pour le reste de ton point 2, je ne crois pas que l’intérêt de l’Occident reside encore dans le maintien des régimes autoritaires et prédateurs des pays arabes, surtout à un moment où la démocratie est menacée partout, yc en Occident.
    3/ j’ai déjà dit que les hydrocarbures du M.O. ne sont plus essentiels a l’Occident.
    4/ on est bien d’accord qu Israel ambitionne, non seulement la conquête d’Eretz Israel mais voit bien au delà. Mais il y a aussi les intérêts et les ambitions des autres pays dont l’A.S. et l’Iran. Et surtout la Chine qui est en passe de devenir la première puissance devant les E.U. Aujourd’hui l’A.S. et l’Iran (réconciliés par la Chine) pouraient bien devenir ses alliés. Ce qui changerait complètement les rapports de force au M.O et la place d’Israel dans cette région, reconfigurée par une forte implication de la Chine ds la géopolique régionale.
    Aujourd hui le MO est à un moment charnière de son histoire il peut basculer dans la guerre et la destruction mais aussi s’engager dans la voie d’une paix durable et de la prospérité. Personnellement, je crois en cette seconde éventualité et je fais ce que je peux pour qu’elle se réalise. Ma tribune n’a été publiée ni par the Guardian ni par Haaretz (qui ne l’ont surement pas lue) alors j’ai pris la liberté de saisir l’ambassadeur de la L’A.S. pour lui demander de la faire publlier dans la presse saoudienne. Je te tiendrai au courant.
    Amicalement.

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