Introduction
J’inaugure cette nouvelle rubrique culturelle par trois séries d’articles traitant de l’histoire des Juifs de l’antiquité. Mais d'abord, pourquoi s’intéresser à celle ci ?
Dans l’introduction de la chronologie du conflit israélo palestinien de mon livre, je justifie l'intérêt de cette chronologie par la mantra bien connue: le passé éclaire le présent. Je ne la répéterai pas encore ici pour justifier l’intérêt de fouiller l’histoire antique des Juifs afin de comprendre l’histoire contemporaine d’Israël, notamment dans la relation de cet état aux Palestiniens. Cette idée est développée dans l'article de Olfi Ilany publiée dans Haaretz en 2022 (bien avant l’attaque du 7 Octobre 2023) que je reproduis dans la rubrique « Gaza dans la presse…. » sous le titre « l'Exode vu par Edouard Saïd ».
Dans la première série des articles dont j’initie, ci après, la publication, je conterai l’histoire des Juifs de la naissance d’Abraham à l’Exode (dit aussi Exil ou Sortie d’Égypte) sous la conduite de Moise qui décède au bord du Jourdain avant de mettre les pieds dans le pays de Canaan, appelé Israël bien plus tard.
Dans la seconde série, nous évoquerons les péripéties d’Israël de la conquête de Canaan (XIII siècle avant J.C) jusqu’à sa disparition et la destruction du 1er Temple (édifié par le roi Salomon à Jérusalem au X ème s.) sous les coups des Babyloniens (VIème siècle av. J.C.) et l’exil à Babylone de l’élite de la population juive (notamment sa classe sacerdotale). l’Exode et la destruction du Temple constituent les événements les plus marquants de l’histoire du judaïsme dit du Premier Temple. Bien que, avant cette destruction et l’exil qui l’accompagne, Israël eût connu, au VIII ème siècle, la destruction de sa partie nord et la déportation d’une fraction de sa population en Assyrie.
A l’inverse des événements rapportés dans la période d’Abraham à Moise qui relèvent plus de la légende que de l’histoire, les épisodes de destruction et d’exil des VIII et VI e. siècles av. J.C. sont attestés par la plupart des savants suite aux découvertes archéologiques des deux derniers siècles de notre ère.
Dans une troisième et dernière série nous évoquerons l’histoire des Juifs de la destruction du Temple de Salomon à celle du second Temple (reconstruit à la fin du VI e. siècle av. J.C, agrandi et embelli par Hérode « roi des Juifs » à la fin du 1er siècle av. JC), la destruction de Jérusalem et la dispersion de la plupart des Juifs à travers l’empire romain en l’an 136 de notre ère.
Il est important de constamment garder à l’esprit que la seule source disponible du récit de la période s’étalant d’Abraham à Moise est la Torah ou Bible juive qui comporte cinq des trente neuf livres de la Bible. Les épisodes suivants sont également contés dans quelques uns des autres livres. Pour cette raison, la question de l’historicité des événements rapportés a été posée par les savants de diverses disciplines (historiens, archéologues, linguistes, théologiens …) au cours des deux derniers siècles, permettant ainsi de trier ce qui relève de l’histoire de ce qui appartient à la légende. Nous traiterons cette question à la fin de ces trois séries d’épisodes.
Il est également important de souligner que ce travail ne prétend pas raconter en quelques pages une histoire qui s’étale sur plus d’un millénaire, a été élaborée sur plusieurs siècles et se présente, depuis l'invention de l’imprimerie, sous forme d'un codex de plusieurs centaines de pages. Tout au plus, allons nous en résumer quelques fragments.
Fragments d’Histoire des Juifs d’Abraham à Moise selon la Bible. (1)
Premier chapitre : d'Abraham à Jacob
Abram.
Tout commence avec Abraham (nom initial Abram). Il naquit et vécut à Ur (Mésopotamie) jusqu’à l’âge de 75 ans quand Dieu lui apparut, (vers -2600 selon le décompte des générations, citées dans la Bible, qui séparent cette époque de faits historiquement attestés) et lui dit : « quitte ta patrie, ton pays et ta famille et va dans le pays que je te montrerai ». Abram partit avec Saraï, sa belle femme, ses biens et serviteurs au pays de Canaan, aux frontières mal définies, identifié par la tradition juive à ce qui s’appellera plus tard « Israël » dont les limites varient, encore aujourd'hui, selon les différentes idéologies de ses occupants juifs. Dieu lui ordonna de s’y établir et changea son nom en Abraham. À cette époque, Saraï n’avait toujours pas enfanté. Avec son accord, Abraham eut un fils (Ismaël) à 86 ans, avec Agar sa servante égyptienne. Quinze ans plus tard Il en eut un second (Isaac) avec Saraï (90 ans et lui 99). Dieu apparaît de nouveau à Abraham conclue avec lui un accord : Dieu accorde à Abraham un pays (du Nil à l’Euphrate) et autant de descendants que « d’étoiles dans le ciel » et Abraham devra se circoncire ainsi que tous ses descendants mâles 8 jours après leur naissance (2). Il devra aussi suivre tous les commandements de Dieu. C’est l’Alliance. Abraham se circoncit à 99 ans ainsi que les siens. Quand Isaac eut 13 ans, Dieu ordonna à Abraham de l’égorger en signe de sacrifice mais au moment ultime, un ange accourut pour mettre un bélier à la place d’Isaac (3). Abraham rendit l’âme à 175 an et Isaac à 137. Ismaël, marginalisé dans la Bible après qu’il fut chassé avec sa mère, de la maison d’Abraham enfantera aussi une large descendance dans le désert où il fut refoulé : les Arabes.
Comment Jacob vola à son jumeau Esau la bénédiction de son père Isaac dans un complot fomentée par Rebecca
Isaac eut de Rebecca deux jumeaux qui se battaient dans son ventre à qui naîtrait avant l’autre. Le premier fut Esaü (roux et chevelu) le second, Jacob, à qui l’Eternel promit qu’il sera servi par son aîné. Esaü vendit à Jacob son droit d’aînesse pour un plat de lentilles. Au moment de mourir, vieux et aveugle, Isaac demanda à Esaü de lui apporter à manger afin qu’il le bénît avant de mourir. Rebecca substitua Jacob (en le couvrant de peaux de moutons) à Esaü qui fut béni à sa place. C’est la première d’une série de supercheries dans l’histoire des Patriarches (Abraham, Isaac, Jacob). On verra plus loin comment Abraham fit passer, une première fois, sa femme Saraï pour sa sœur (de peur que les Égyptiens ne le tuent pour la lui prendre) et une seconde fois auprès de Abimelek, un roi Canaanite du sud du Neguev, en échange d’une faveur. Plus tard Isaac usa du même subterfuge (avec le même Abimelek ou un descendant) en faisant passer Rebecca sa femme pour sa sœur. Mais la Bible nous rassure que Dieu intervint dans les trois cas pour sauver l’honneur de Saraï et de Rebecca. Et la liste des supercheries s’allongera encore avec Jacob fils d’Isaac.
Jacob est amoureux de Rachel fille de Laban, son oncle paternel et frère de Rebecca et cousine de Jacob. Il se met, alors, au service de Laban pour une durée de sept ans en échange de Rachel. La nuit de noce Laban substitue Léa, sœur aînée de Rachel à celle ci. Jacob est alors obligé de travailler pour Laban sept ans de plus pour avoir aussi Rachel. En prime, il eut aussi pour concubine une servante de la famille de Laban.
C’est probablement de ces légendes sans fondement historique, comme tous les événements rapportés dans ce chapitre, qu’est né le préjugé antisémite de « fourberie du Juif » qu’on entend parfois encore, des millénaires plus tard.
Descendance de Jacob
Léa enfanta de quatre garçons, dont Levi et Juda alors que Rachel, stérile, met dans la couche de Jacob sa servante qui enfanta Naphtali. Ce à quoi Léa réagit en gratifiant Jacob de sa servante qui lui donna deux garçons dont Gad.
Un jour un des fils de Léa cueillit des mandragores pour sa mère qu’elle offrit à Rachel en échange d’une nuit avec Jacob dont le fruit fut un garçon (Zebulon) et ainsi de suite. Au total, Jacob eut avec Léa, Rachel et leurs servantes douze garçons dont Joseph, son préféré. Chacun d’eux sera l’ancêtre d’une des « douze tribus d’Israël ».
Jacob devient Israël
De retour chez lui (avec ses deux femmes, ses concubines, ses serviteurs et troupeaux) après vingt ans de servitude chez son oncle Laban, Jacob se bat contre... Dieu (ou un ange selon certains, choqués par l’idée d’un combat entre Dieu et un Juif) qui lui assène un coup au « tendon de la hanche », le bénit et lui dit que dorénavant il s’appellera Israël (littéralement, celui qui se bat- Isra- contre Dieu -El). Depuis il sera interdit aux Juifs de manger le tendon de la hanche des animaux.
(1) l’essentiel des informations contenues dans ce chapitre est emprunté au livre d’Israel Finkelstein (archéologue de l’université de Tel Aviv) et Neil Asher Silberman, historien. Titre français: la Bible dévoilée (the Bible unearthed). Folio histoire 2011.
(2) Tradition adoptée par les Musulmans bien que le Coran ne la mentionne pas comme obligation.
(3) Épisode figurant dans le Coran avec Ismaël à la place d'Isaac
Fragments d’Histoire des Juifs d’Abraham à Moise selon la Bible. (1)
chapitre 2: De Jacob à Moïse
Joseph gouverneur d'Égypte
Joseph, fils préféré de Jacob/Israël suscita la jalousie de ses frères qui le jetèrent dans une citerne, l’en retirèrent et le vendirent à des caravaniers en route pour l’Egypte qui le revendirent à Potiphar, un officier de pharaon. La femme de Potiphar tenta de séduire Joseph arrivé à l'âge adulte ( « couche avec moi » lui dit-elle). Joseph ayant refusé, la femme de Potiphar lui déchira sa chemise et prétendit qu’il avait tenté de la violer. Il fut jeté en prison mais l’enquête ordonnée par le Pharaon conclut à l’innocence de Joseph en se basant sur l’emplacement de la déchirure de la chemise (dans le dos alors qu’il s’éloignait de la Potiphar et non quand il était censé s’avançer vers elle pour la violer). Comme quoi, les fausses accusations de viol, dont les médias européens font leurs choux gras de nos jours, ont une longue histoire à leur actif. Par la suite, Joseph se fit une réputation d’interprète des rêves qui parvint à Pharaon qui le prit à son service. Pharaon fit un rêve où il était question de vaches maigres que Joseph interpréta comme survenue prochaine d’une grande famine et conseilla à Pharaon de faire des réserves de grains. Ce qui advint effectivement et valut à Joseph d’être nommé gouverneur de l’Egypte où il fit venir sa famille (70 personnes au total), de Canaan où sévit la famine vers le début du second millénaire av. J. C.
La famine qui frappa, plus tard l’Egypte, permit à Joseph d’acheter pour Pharaon toutes les terres du pays que les égyptiens furent autorisés à cultiver moyennant un fermage du cinquième de la récolte (le khammas n'est pas une invention de notre ruralité). Cette légende a été reprise dans le Coran (Surat Youssouf.) plus d’un millénaire après avoir été consignée dans la Bible.
Jacob/Israël rendit l’âme en Égypte (âgé de 147 ans) suivi de Joseph à 110 ans. Le nouveau pharaon, inquiet de la prolifération des descendants d’Israel/Jacob, appelés "Hébreux" (mot d'origine inconnue) ou "Israël" du fait que ce terme, dans la Bible, désigne tantôt le pays tantôt ses occupants, les soumet à l'esclavage « car en cas de guerre, ils se joindraient à nos ennemis », et ordonne de noyer tous les nouveaux nés mâles, en vue de l’extinction de cette race prolifique.
Naissance de Moise.
Moise est l’un des fils de Levi (lui même un des six fils de Jacob et Rachel). Sa femme, Levite, le mit, peu après sa naissance, dans un panier qu’elle mit dans le Nil pour échapper au décret de Pharaon. Moise fut repêché par la fille de Pharaon qui l’adopta. Devenu grand Moise tua un garde Égyptien qui maltraitait un Hébreu et s’enfuit au pays de Marian, dans le désert, où Dieu se manifesta à lui, « derrière un buisson ardent » et lui ordonna de sortir les Juifs d’Egypte. Pour le convaincre qu’il était bien Dieu et non quelque imposteur, il lui ordonna de jeter son bâton par terre qui se transforma aussitôt en serpent. Après quoi, il lui ordonna d attraper le serpent par la queue qui, aussitôt, redevint bâton. Convaincu, Moise retourna en Égypte où il se heurta au refus de Pharaon (de laisser partir les Juifs) mais dut se plier après que dix plaies ( Eaux du Nil transformées en sang, épidémie, pluie de crapauds méchants, famine et surtout mort de tous les nouveaux nés égyptiens alors que ceux des hébreux sont épargnés - histoire sur laquelle nous reviendrons) ordonnées par Dieu eurent frappé l’Egypte. 600 000 hébreux (la grande nation promise par Dieu à Abraham) et un nombreux bétail quittèrent ainsi l’Egypte, 430 ans après l’arrivée dans ce pays de la famille d’Isaac/Jacob (70 personnes, au début second millénaire). C’est l’Exode, qui eut lieu selon la Bible vers le milieu du XV e.s., marqué par un premier miracle lorsque, sur ordre de Dieu, les eaux de la mer Rouge se retirèrent pour laisser passer Moise et son peuple en route vers le pays de Canaan et noyèrent les troupes de Pharaon lancées à leur poursuite. Dieu apparut de nouveau à Moise (cette fois ci de visu) sur le mont Sinaï et lui remit une tablette d’argile sur laquelle étaient gravés les dix commandements. Il lui dicta aussi la Torah que Moise mit par écrit en cinq livres (Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deuteronome) qui constituent la Bible écrite (appelée aussi Torah et Pentateuque) et Il lui souffla à l’oreille des messages (bible orale qui contient les codes nécessaires à la compréhension de la Bible) qui ne furent couchés par écrit que des siècles plus tard sous la forme de ce qui fut appelé "Mishna" (laquelle, enrichie des commentaires des rabbins sur plusieurs siècles, constitue le Talmud). Parmi les événements qui ont marqué L’Exode, celui où Moise, redescendu du mont Sinaï où il avait reçu les Tables de la Loi des mains de Dieu, découvre ses ouailles en train d’adorer un veau confectionné avec les bijoux en or que les juifs avaient emporté avec eux. Ceci avec la complicité (consentie ou forcée d’Aaron, frère de Moise). Moise furieux et désespéré de son échec de redemption de son peuple, casse les Tables de la loi. La saga n’en est pas pour autant finie car Dieu, pardonnant aux Juifs leur grave péché, remet à Moise une copie qu’il avait gardée prudemment par devers lui. Cet événement est le précurseur d’une série de situations récurrentes dans la longue relation de Dieu avec le peuple qu’il avait élu: Retour des Juifs à l’idolâtrie suivi du pardon divin (après une sévère punition parfois). Il pourrait aussi, être, à l’origine de certains préjugés comme « l’amour excessif des Juifs pour l’argent ». L’Exode est marqué de nombreux événements qui sont célébrés tous les ans depuis lors: la sortie d’Egypte est commémorée lors de Pessah (dite aussi Pâque juive), le « Don de la Torah » est celebré lors de la fête dite de Shavouot, Souccot ou « fête des cabanes » commémore l’usage des abris de fortune lors de l’Exode. Les nombreuses fêtes qui ponctuent l’année calendaire juive et les rites très particuliers et parfaitement détaillés (lecture de textes sacrés, nourriture, libations, chants et danses….) qui les accompagnent constituent un des traits marquants de la tradition juive. Pieux croyants ou laïcs, la plupart de ceux qui s’identifient comme Juifs les respectent. Leur importance comme marqueurs de l’identité juive nous incite à leur consacrer des écrits à part, aux dates de leur célébration*.
La traversée du désert dura 40 ans (le temps d’une génération de sorte qu’aucun de ceux qui atteignent Canaan, n’ait connu l’esclavage). Moise mourut, au moment où il s’apprêtait à y entrer, chargeant Aaron, son frère, de lui succéder. Le dernier miracle qu’on relève dans la Torah est que Moise, rédacteur du dernier livre de celle ci, le Deuteronome, y consigne sa propre mort.
Le récit de cette saga qui fonde le Judaïsme et, quelques siècle plus tard, le Christianisme et dont de nombreux événements sont rapportés dans le Coran a été considérée comme parole de Dieu transcrite par Moise pendant l’Exode. Ce n’est qu’aux « Temps des Lumières » que certains philologues ont commencé à émettre des doutes sur sa véracité. Notamment quant ils ont relevé que Moise raconte sa propre mort dans le Deuteronome ou que le chameau, comme bête de somme, y apparaît plusieurs siècles avant sa domestication par les égyptiens ou encore que le récit de certains événements s’accompagne de la formule "on en voit encore les traces de nos jours"… Nous reviendrons plus loin sur cette importante question.
* Deux textes relatifs à Pessah sont déjà disponibles dans ce site.
Les Têtes de l’Art, Conseils d'un octogénaire pour vivre mieux
Essayez de consulter moins de cinq médecins.
J'aimerais pouvoir suivre cette règle moi-même, mais avec l'âge, mon rapport à la médecine a radicalement changé. J'ai maintenant plus de médecins que je ne l'aurais jamais cru possible, chacun spécialisé dans une partie de mon corps dont j'ignorais l'existence. Ils rivalisent pour attirer l'attention. Cette semaine, la compétition oppose mes reins à ma rate.
Mon père et ma fille étaient tous deux médecins. Actuellement, la famille compte sept médecins, et un petit enfant est en faculté de médecine. Ce ne sont pas les médecins que je déteste, mais plutôt la sensation débilitante de passer de l'un à l'autre comme une voiture sur une chaîne de montage. Si, au moins, le produit final était une Lamborghini, ça m'irait bien. Mais pas une Studebaker.
Rejoignez une bande.
Ce conseil s'adresse davantage aux hommes qu'aux femmes, car les femmes font toujours partie d'un groupe ou d'un autre. La socialisation est une valeur naturelle pour les femmes, et c'est pourquoi le monde serait meilleur si elles le dirigeaient. Elles savent fonctionner en groupe. Les hommes, en revanche, sont solitaires et statiques. Des généraux sans guerre, chevauchant des chevaux en bronze. Ils ont perdu l'instinct grégaire de leur espèce, mais ils le devraient, surtout quand une trop grande solitude engendre la morosité. Rejoignez un gang, je vous dis. Je ne parle pas d'un gang de motards, mais simplement d'un groupe de gars qui partagent un intérêt commun pour quelque chose. Rejoindre un gang est aussi bénéfique pour la société, et même pour nous. Ça nous évite d’être dans la rue avec ses risques d'accident.
Ma bande, c'est les Têtesdel'Art, ainsi nommée en raison de notre intérêt pour les films nuls. Nous sommes sept ou huit, artistes pour la plupart, et nous sommes ensemble depuis une quarantaine d'années. Nous occupons la première rangée de sièges au cinéma, nous nous lançons du pop-corn et nous faisons des commentaires bruyants pendant la séance, ce qui ne nous rend pas sympathiques aux autres. Même si une femme m'a confié, une fois, qu'elle préférait nos commentaires stupides aux dialogues du film.
Regrets
Ils font partie de la vie. Apprenez à faire avec.
(extraits d'un article du NYT du 14/5/25)
[Parlant des incendies qui ravagent le centre d’Israël, Haaretz du 30/4/25 écrit : Il semble que la nation brûle sur presque tous les plans – physiquement, politiquement et émotionnellement. Un point symbolique de l'immense incendie qui ravage le pays a été l'évacuation d'un village situé au cœur des flammes, Neve Shalom. Cette ville unique d'Israël officiellement vouée à la coexistence pacifique et à la réconciliation judéo-arabe, a subi jusqu'à présent les plus graves dégâts.
Neve Shalom est une expérience passionnante que raconte un docu-film israélien de 2022, « les enfants de la paix", auquel Haaretz avait consacré un article à l’époque et que je reproduis ci-après.]
Un enfant de Neve Shalom , l'« Oasis de la Paix » judéo-arabe d'Israël, se penche sur son passé
Un documentaire [datant de 2022] « Enfants de la paix », explore Neve Shalom (Wahat-as-Salam), une expérience sociale israélienne unique qui, depuis plus de 50 ans, voit Juifs et Arabes cohabiter dans un même village. C'est peut-être le seul endroit en Israël où enfants arabes et juifs ont pu grandir ensemble, complètement insouciants des conflits qui les entouraient.
À tel point qu'Omer, un enfant juif élevé dans ce village coopératif, affirme n'avoir jamais vu de différence entre ses amis juifs et arabes avant d'être beaucoup plus âgé. « Ce qui était génial, c'est que nous n'en étions absolument pas conscients ».
À l'instar du mouvement des kibboutz, quoique à une échelle bien plus modeste, Neve Shalom est largement considéré comme une expérience sociale israélienne unique. Située à mi-chemin entre Jérusalem et Tel-Aviv, c'est la seule communauté d'Israël où Juifs et Arabes viennent par désir sincère de vivre ensemble – et non faute d'un endroit meilleur où aller.
L'idée initiale était que Neve Shalom ( Wahat as-Salam, Oasis de la Paix) – serve de modèle aux autres villes mixtes judéo-arabes d'Israël où la vie n'est pas toujours aussi harmonieuse.
Fondé en 1970, Neve Shalom abrite environ 70 familles (1)– réparties à parts égales entre Arabes et Juifs, par principe – qui se consacrent à la promotion de la paix et de l'égalité. Les enfants du village étudient ensemble dans une école primaire mixte, la première du genre en Israël, où ils suivent des cours d'hébreu et d'arabe donnés par des enseignants appartenant aux deux ethnies (2)….
Dans « Enfants de la paix », le réalisateur Maayan Schwartz cherche des réponses aux questions liées à la coexistence des Juifs et des Arabes sur une même terre, à travers une série d'entretiens avec des adultes, des deux ethnies, ayant grandi à Neve Shalom, comme lui-même.
Neve Shalom n'était pas assez grand pour abriter son propre lycée. Dès la fin du cycle élémentaire , les enfants étaient contraints de se séparer et l’éloignement physique entraînait l’éloignement des mentalités. Puis venait le service militaire obligatoire pour les jeunes juifs qui finissait de dresser une barrière entre eux et leurs anciens camarades arabes.
Pour une communauté déterminée à promouvoir la paix par l'exemple, la question du service militaire allait être une source de tension permanente à Neve Shalom, atteignant un paroxysme à la fin des années 1990 lorsqu'un jeune conscrit de la communauté a été tué au Liban. La question de savoir s'il fallait ou non rendre hommage à ce jeune homme et comment, allait finir par dresser les habitants de Neve Shalom les uns contre les autres avant de devenir une controverse nationale.
L'une des scènes les plus révélatrices dans « Les Enfants de la Paix » a été filmée dans une salle de classe le matin du « Jour du Souvenir », jour où Israël rend hommage à ses soldats tombés au combat. Les enfants juifs sont invités à sortir pour assister à la cérémonie en leur honneur, tandis que les enfants arabes sont priés de rester en classe. On réalise à quel point les défis auxquels cette communauté est confrontée sont insurmontables, lorsque l'enseignante tente d'expliquer aux enfants arabes pourquoi les Juifs sont en deuil ce matin et en fête dès ce soir, pour la célébration de la fête d'Indépendance le lendemain, alors que les Arabes comméreront, dans le deuil, la Nakba. Elle explique ensuite comment un même événement peut donner naissance à deux récits différents.
On se demande, avec le réalisateur, si cette expérience a été un succès ou un échec ? Si le critère de réussite est de savoir si le village a rempli sa mission d'apporter la paix et l'égalité aux Juifs et aux Arabes vivant en Israël, alors il s'agit clairement d'un échec. Les Arabes et les Juifs à l'origine de cette initiative unique, malgré toutes leurs tentatives, n'ont jamais réussi à communiquer, à de larges pans de la société israélienne, leur idéalisme.
Mais si le critère est de savoir si ceux qui ont grandi dans ce village souhaitent encore y vivre et y élever leurs enfants – et ainsi témoigner de leur identification à ce qu'il représente – alors l'expérience pourrait bien avoir réussi. Car le film révèle que de nombreux amis d'enfance de Schwartz qui ont quitté Neve Shalom y sont revenus des années plus tard, après avoir compris qu'ils ne se sentaient chez eux nulle part ailleurs dans le pays.
Cela vaut également pour le cinéaste. Après avoir passé de nombreuses années à Tel-Aviv, Schwartz retourne à Neve Shalom avec sa femme et son fils. Ce qui semble avoir motivé son retour, ce sont les violents affrontements qui ont éclaté l'année précédente [2021] dans des villes mixtes judéo-arabes du pays [pendant un nouvel épisode de confrontation militaire entre Israël et le Hamas].
Pour lui, s'il reste un espoir pour ce pays divisé, il se trouve dans cette petite oasis [Wahat Assalam]
Haaretz 2/06/22.
- [Ce chiffre, 70, m'interpelle serait il une allusion aux 70 membres de la famille de Jacob qui auraient émigré en Égypte pour y rejoindre leur congénère Joseph, devenu vizir de Pharaon ? voir chapitre 1 de « l'histoire des Juifs » dans mohammedchraibi.com>culture].
- [Neve Shalom est devenu la vitrine qu'Israël tient à montrer aux dignitaires en visite en Israël, telles que la rock star Roger Waters, le physicien feu Stephen Hawking, le Dalaï Lama et Hillary Clinton].